Avec la contribution de Rachel DETHIER, Secrétaire Générale du SIRRMIET
Le 6 juin 2021 a été publié au Journal officiel la décision n°22 votée par la Commission Copie Privée prévoyant un barème différencié de redevance copie privée pour les smartphones et tablettes reconditionnés à compter du 1er juillet 2021. Cette décision d’un barème différencié pour le reconditionné a finalement été entériné malgré des mois d’actions dans le cadre de la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France (REEN) mettant en porte à faux les entreprises du secteur du reconditionné (hors ESS).
Rappel des événements
La redevance pour la copie privée permet de percevoir un prélèvement sur les appareils neufs pouvant stocker des fichiers soumis aux droits d’auteurs et droits voisins.
Le 10 juin 2021, la balance a penché en faveur du Ministère de la Culture, l’Assemblée Nationale a approuvé l’amendement qui vise à étendre « rémunération pour copie privée » (RCP) aux smartphones et tablettes reconditionnés, jusque-là exemptés puisque celle-ci est déjà appliquée sur le prix du produit neuf.
Bien que les produits reconditionnés bénéficient d’un taux spécifique (un montant 35 à 40% moins élevé pour le reconditionné), la redevance a mis à mal la filière du reconditionnement et entre en contradiction avec les ambitions de la loi REEN quand on connait la priorité d’allonger la durée d’usage des équipements numériques par la seconde main. Les acteurs de l’Économie sociale et solidaire ont été exemptés de cette taxe.
Début août 2021, le SIRRMIET a attaqué la décision n°22 de la Commission Copie Privée devant le Conseil d’Etat (recours en excès de pouvoir) et ont entamé des discussions avec le gouvernement.
Une enveloppe de 15 millions d’euros pour les produits reconditionnés
Le gouvernement a pris en compte la fragilité de la filière et a mis en place un dispositif de soutien afin d’aider et de dynamiser ce secteur, jusque là, à fort potentiel.
Une enveloppe budgétaire de 15 millions d’euros a été débloquée et s’appuie sur deux volets : la création d’un Label qui permettra de « développer un marché du réemploi et de l’occasion de qualité et d’apporter de la lisibilité et de la confiance au consommateur vis-à-vis du reconditionné » , ainsi qu’une aide exceptionnelle s’inscrivant dans le cadre du régime de minimis, avec un plafond de 200 000 euros par entité. L’aide directe prend la forme d’un montant de 8 euros versé pour chaque smartphone ou tablette reconditionné en France et mis sur le marché sur la période du 1er juillet 2021 au 31 décembre 2022.
Une aide soumise à condition
Bien que l’aide exceptionnelle ait été la bienvenue, les organisations se sont finalement heurtées à de nouvelles contraintes :
- celles qui ont déjà perçues des aides ou celles qui font le plus de volume atteignent rapidement le plafond et ne peuvent pas bénéficier de l’aide alors que la redevance elle est toujours appliquée
- l’aide est temporaire , seulement prévue pour couvrir la période de juillet 2021 à décembre 2022
A savoir que les organisations n’ont pas obligatoirement répercuté le montant de la redevance sur le prix afin de pouvoir faire face à la concurrence étrangère déjà très vive.
Et pour la suite ?
Les reconditionneurs ont désormais un siège à la commission copie privée pour discuter du barème. Dans le cadre des renouvellements de mandat le SIRRMIET et RCUBE seront représentés mais les travaux n’ont pas encore commencé.
Le gouvernement souhaite également travailler sur des mesures plus structurelles pour aider ce secteur fragile. L’enveloppe de 15 millions est accompagnée d’un travail de restructuration de la filière, en la « valorisant auprès des consommateurs et des acheteurs publics et en soutenant le développement de la formation à la réparation et au reconditionnement de produits numériques« . Un groupe de travail relatif à la régulation des plateformes des produits reconditionnés étrangères devrait également voir le jour pour « évaluer la façon dont les vendeurs de matériel électronique extra-communautaires s’acquittent de leurs obligations légales et de proposer des dispositifs à même de corriger d’éventuelles distorsions de concurrence le cas échéant » .
Dans le cadre de la loi REEN, de nouveaux rapports sont attendus : Un rapport attendu sur la commission copie privée, un rapport qui évaluera si le barème doit être revu, ainsi qu’un rapport d’étude de l’impact économique.