Quand l’expression de besoins devient responsable

Article écrit par Philippe Derouette,
Directeur adjoint stratégie, financement, relation partenaires de l’INR
Manager de projets Numérique Responsable, IT-CE, Groupe BPCE

Green IT

La nature des besoins
Les besoins recouvrent l’ensemble de tout ce qui apparaît «être nécessaire» à une personne ou à une organisation, que cette nécessité soit consciente ou non.
Historiquement cette question a été théorisée par Karl Marx au 19ème siècle. Elle a été reprise dans les années 60 par d’autres philosophes comme André Gorz ou Agnès Heller qui ont mis en regard les besoins vitaux versus non essentiels. Plus récemment le Sociologue Razmig Keucheyan a écrit un livre sur « les besoins artificiels » pour mettre en évidence ce dont nous avons (vraiment) besoin.

Une transformation digitale qui devient « responsable »
Alors que la transformation digitale est en bonne voie d’achèvement, les entreprises se mobilisent maintenant pour limiter les impacts de cette transformation.
La composante numérique responsable s’inscrit donc de plus en plus dans l’élaboration des produits et des offres.

Où commence le principe de responsabilité ?
Le philosophe Hans Jonas l’a introduit dans les années 80 (cf. son livre « le principe responsabilité – 1979 – édition : PUF).
Précisément dans le but de se prémunir des effets délétères de la technologie sur l’humanité et sur l’environnement.
Dans le cas des services numériques, pour être réellement efficient, il faut appliquer ce principe sur l’ensemble du cycle de vie du produit.
Et le cycle de vie débute immanquablement par… l’expression de besoins.

Satisfaire le client mais en le guidant 
Nous partons généralement du postulat que le client (ici, le donneur d’ordre) a une demande qu’il faut satisfaire par tous les moyens. En guidant l’expression de son besoin vers le principe de responsabilité, tout en respectant ses exigences, nous allons faciliter une conception « responsable ». Rendre responsable un besoin est un acte délicat car il ne faut pas limiter la créativité ou l’ingéniosité, réduire l’ambition, braquer le business, ou faire prendre des risques à l’entreprise.

Une expression responsable qui respecte les besoins.  
Il est donc judicieux d’aiguiller le donneur d’ordre vers le « principe de responsabilité ». Comment ?  en l’aidant à formuler les besoins qualitatifs dans le but de prévenir les impacts négatifs du service numérique sur l’ensemble de son cycle de vie, tout en conservant ses qualités d’usage et sa justesse fonctionnelle. Pour cela il faut le sensibiliser et l’accompagner pour qu’il comprenne, intègre et finalement requière cette dimension dans ses spécifications. Il ne s’agit pas de limiter, de restreindre ou de diminuer ses souhaits. Mais plutôt d’orienter son expression pour les rendre compatibles avec une architecture, une conception, un développement et une pérennité durables.  

Pourquoi est-ce si important d’encadrer le besoin ?  
Tout simplement parce que plus le besoin exprimé est sobre (voire frugal) et prend en compte les impacts RSE, plus la conception responsable est facilitée et plus le produit sera efficient. A contrario, si la demande est immodérée, tous les efforts risquent fort d’être vains.

L’expression de besoins responsables comme 1ère phase de la conception responsable  
Cette phase initiale que l’on peut baptiser « expression de besoins responsable(s) » est cruciale car c’est là que l’on précise la justesse/sobriété du besoin.  
Elle se positionne en amont et se combine avec :  

  1. Les méthodes agiles qui ont permis de recentrer le client et de lisser la complexité
  2. Et le Devops qui a renforcer l’efficacité

« L’expression de besoins responsable(s) » n’ajoute rien au process, mais rend la conception responsable plus certaine de délivrer un produit efficient.